Voilà un film qui aura fait parler de lui, et pas forcément pour de bonnes raisons. La polémique finit en effet toujours par nuire au propos d'une oeuvre, car le buzz prend alors le pas sur le réel contenu et pose des oeillères au public (qui verra dès lors non pas ce qu'on lui montre mais bien ce qu'il veut voir - dans un sens ou dans l'autre).
Or Welcome mérite mieux que cela. Il doit être vu comme un film et non une charge politique - ce n'est pas que l'un exclut l'autre, mais dans ce cas en fait, l'un renforce l'autre. Déjà on peut dire que ça fait plaisir de voir le cinéma français attrapper à bras le corps des situations sociales existantes pour en extraire une oeuvre de fiction forte et couillue. Les Anglais ont une longue tradition de cinéma sociale dont nous pourrions nous inspirer. Si Welcome pouvait être un premier pas dans cette direction, j'en serai heureux.
Or Welcome mérite mieux que cela. Il doit être vu comme un film et non une charge politique - ce n'est pas que l'un exclut l'autre, mais dans ce cas en fait, l'un renforce l'autre. Déjà on peut dire que ça fait plaisir de voir le cinéma français attrapper à bras le corps des situations sociales existantes pour en extraire une oeuvre de fiction forte et couillue. Les Anglais ont une longue tradition de cinéma sociale dont nous pourrions nous inspirer. Si Welcome pouvait être un premier pas dans cette direction, j'en serai heureux.
Mais venons-en au film lui-même.Welcome nous narre l'histoire de la rencontre entre un jeune Kurde en situation irrégulière souhaitant passer en Angleterre pour retrouver sa petite amie et un professeur de natation divorcé en pleine déprime. C'est donc avant tout une histoire d'amitié ; simple, forte et belle. C'est là la force du film : le message politique ne prend jamais le pas sur les personnages et le scénario, il en découle naturellement. C'est à travers le prisme de l'histoire de ces deux protagonistes que l'on voit, toujours en filigrane ou en arrière-plan, le sort qui est celui des sans-papiers à Calais. Autant dire que ce parti-pris désamorce totalement les accusations d'angélisme portées contre ce film. Car il faut bien avouer que tous les faits choquants sur la façon de traiter les immigrés clandestins sont très pudiquement montrés : c'est dans un coin du cadre, à travers un dialogue avec la Police, par une anecdote, etc. Jamais de full frontal brutality destinée à choquer gratuitement. Encore une fois, le malaise face à ces pratiques nait avant tout de l'identification au jeune Kurde.
Techniquement le film est également impeccable. La réalisation est extrêmement bien pensée : cadrant au plus près les personnages, elle joue de tous les éléments du plan pour recréer une sensation de claustrophobie, d'enfermement. Petites ruelles, travées d'un port de transit, lignes de la piscine, couloir étroit d'un appartement, jusqu'à une salle de tribunal surpeuplé dans laquelle un juge travaille à la chaîne. En découle un sentiment de malaise profond, presque physique, à l'image de ce que peuvent ressentir les clandestins obligés de porter un sac sur la tête pour déjouer le contrôle au CO2 lorsqu'ils squattent un camion. La mise en scène exploite parfaitement l'anti-cinégénie de Calais en hiver pour distiller un désespoir palpable.
Les acteurs sont excellents également. Lindon prouve qu'il est toujours un des acteurs les plus intéressants du cinéma français et qu'il ose prendre des risques pour des projets casse-gueule (après Pour Elle notamment). Le jeune Kurde parvient, sans jeu larmoyant, à faire passer tout l'espoir et le désespoir de son personnage - prêt à traverser la Manche à la nage en plein hiver pour un avenir meilleur. Même sa petite amie à peine entrevue est sublime de retenue et de pudeur. Le point fort du film à ce niveau étant de parvenir à nous émouvoir sans sortir les violons et le pathos surlignant, juste en nous présentant une situation tragique mais devenue tellement banale.
Je n'irai pas jusqu'à dire que Welcome est une expérience plaisante. Au contraire, on est étreint dès le début par une mosaïque de sentiments qui ne nous lâcheront pas jusqu'à la fin et même après (tristesse, dégoût, révolte, colère, etc.).
Et on a réellement mal en voyant ce que notre pays est en train de (re)devenir à cause d'une politique absurde et inefficace, qui nie l'humain au profit du chiffre. C'est pourquoi j'ai envie de dire qu'aller voir Welcome serait un acte citoyen, un signal fort à envoyer ; même si j'ai conscience d'aller à l'encontre de ce que je professe dans le premier paragraphe de cette critique...
Je partage pleinement ton avis sur le film. Les extraits m'avaient donné envie déjà.
RépondreSupprimerEt puis, j'habite pas loin... j'ai failli renverser de nuit plusieurs rescapés marchant sur autoroute il y a plusieurs années, ça marque.
Le film est bon et met pas mal de choses à plat.
Je n'ai aucun avis à donner, je n'ai pas vu le film. En fait c'est juste pour griller Stephlong.
RépondreSupprimerAlors ça c'est petit, je ne suis pas encore allé voir le film mais la critique de Rom1 me donne bien envie.
RépondreSupprimerOui c'est vrai que tu m'as grillé Brain, je me vengerai dans un bestiaire par exemple Gnark Gnark
Excellent billet qui résume tout ce que j'aurais pu en dire (je suis allé le voir hier). J'ajouterais simplement uue certains passages font un peu penser au film Les Fils de l'homme. Sauf que là, ce n'est pas de la SF. J'ai eu les larmes aux yeux du début à la fin et parfois une forte envie de gerber. Paradoxalement, c'est pour ça que j'apprécie ce film.
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