mardi 23 mars 2010

La Brigade chimérique - tome 4


Voilà, après plusieurs mois d'attente, sort enfin le tome 4 de la Brigade chimérique, ce comic-book à la française dont je vous rebats les oreilles depuis août dernier. Alors comme d'habitude, je me livre à une modeste critique & analyse en ce blog, en espérant toujours donner à mes quelques lecteurs épars envie de découvrir cette oeuvre qui en vaut réellement la peine. Ce que confirme sans peine ce tome 4, d'ailleurs...
Attention, ce billet contient de gros spoilers. Si vous n'avez pas encore lu le tome, soyez prévenus !

Comme les précédents, ce volume contient deux épisodes.
"Politique internationale" met en place de nombreux évènements capitaux. Le Nyctalope et l'Accélérateur sont à Moscou pour négocier une alliance avec Nous Autres, contre Mabuse ; mais le Comité central fait traîner les choses et le Grand Frère semble absent. A Paris, l'Institut du Radium planifie une attaque contre le CID afin de délivrer Gregor Samsa : c'est bien sûr Jean Séverac qui en sera le fer de lance, malgré ses doutes. Le Gouvernement français, pendant ce temps, envoie Félifax en mission à Métropolis.
Dans "H-A-V-Russe" (titre énigmatique s'il en est), l'assaut est lancé ! La Brigade délivre un Cafard à l'agonie pour se voir révéler de sa bouche l'effroyable projet de Mabuse et les secrets de la naissance de Métropolis. Tandis qu'à Moscou, le Nyctalope et l'Accélérateur vont de déconvenue en déconvenue... Enfin, Mabuse fait une démonstration de sa puissance à un mystérieux invité, scellant une alliance qui va plonger l'Europe superscientifique dans le chaos de la guerre...

Il y a beaucoup de choses à dire sur ce tome, ces épisodes. Ils marquent un réel tournant dans la narration de la Brigade chimérique. Jusqu'ici, le ton de la BD restait assez léger : certes le contexte géopolitique était pesant, menaçant mais restait en arrière-plan. Mabuse restait un adversaire diffus, en filigrane. Les trois premiers tomes s'attachaient finalement surtout à nous décrire un univers et à en présenter les protagonistes dans une optique "super-héros européen".
Le titre du premier épisode du tome sonne comme un rappel du contexte... C'est le retour en force des menaces qui pèsent sur la paix : Mabuse revient au premier plan tandis que Nous Autres fait la démonstration de sa duplicité ; et les démocraties de l'Europe de l'Ouest paraissent bien pathétiques dans leurs tentatives pour sauver la paix, au mépris même de leur honneur. Le ton se fait plus sombre, plus menaçant. La guerre gronde et se rapproche de plus en plus, les réelles alliances se nouent, les personnages montrent leur vrai visage (la faiblesse du Nyctalope finit par lui être fatale)... Ce tome qui inaugure la seconde moitié de l'histoire de la Brigade chimérique donne le la pour la suite : ce sera sombre et désespéré, comme l'Histoire réelle après tout.
Cela dit, le côté comic n'est pas oublié pour autant. L'attaque du CID, l'infiltration de Félifax près de Métropolis, le combat du Baron Brun et du Docteur Sérum contre la Reine Vampyre sont autant de scènes super-héroïques en diable ! C'est dynamique, coloré, iconique même - et les touches d'humour sont toujours présentes durant ces passages.

Venons-en à présent au GROS morceau de ce tome. La révélation de poids, le secret de Mabuse et donc le traitement que font les auteurs d'un évènement auquel on ne pouvait que difficilement échapper vu l'époque : la Shoah, l'extermination du peuple juif.
Disons le tout net : c'est à la fois couillu et brillant. De cet évènement encore tabou (et pour cause !), la BD parvient à rendre toute l'horreur, toute l'atrocité (félicitations au dessinateur Gess pour la double-page qui nous révèle l'indicible : c'est juste glaçant) en parvenant dans le même temps à parfaitement l'intégrer dans l'univers superscientifique jusqu'ici développé. C'est une synthèse admirable, qui donne au mot Holocauste ("sacrifice") tout son sens. C'est également très casse-gueule et gageons que cela fera jaser - il reste à espérer que les lecteurs sauront faire la part des choses et comprendre la démarche des auteurs.

Avec ce tome 4, la Brigade chimérique ne déçoit décidément pas. L'histoire prend un nouveau tournant, on entame la dernière ligne droite. Les révélations secouent et ne sont que le prémisse d'une descente aux enfers que l'on ne peut qu'attendre au vu du projet initial : après tout, ne parle t'on pas de la fin des super-héros européens ?

9 commentaires:

  1. Bon, s'il y a des spoilers, je lirai ton post après avoir lu le truc, surtout que j'avais bien aimé le troisième tome.
    (je suis beaucoup plus circonspect et moins enthousiaste que toi à propos des deux premiers par contre)

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  2. Oh vous ici, agent 007 ? :o
    Oué, réserve toi la lecture du tome d'abord vu les révélations qu'il contient.

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  3. Dis donc, tu ferais pas un peu d'informercial pour l'Atalante toi ?
    Je suis passé chez mon dealer de BD cet aprèm et il m'a dit que le tome 4 ne sortirait que vendredi...

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  4. Ouhlà, "infomercial" quel vilain mot !
    Non quand même pas. Mon billet exprime mon ressenti exact, il n'est pas question de publicité obséquieuse.

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  5. Je taquine quant à la provenance de ton exemplaire (le contenu du post, je ne sais pas encore je le lirai après lecture du volume 4 -même si j'avoue trouver tes critiques précédentes un peu dithyrambiques quand même) :-)

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  6. Bon, je viens lire cet avis APRES avoir lu le volume, par peur des spoilers. Mais finalement, j'aurais pu le faire avant: contrairement à la critique que j'ai faite par ailleurs où je me suis senti obligé d'en dire le plus possible, celle-ci est bien plus efficace pour un futur lecteur car elle évoque quelque chose de très grand sans donner de trop grosses précisions.
    Et c'est un très grand volume, réellement. Je partage la passion manifeste du maître des lieux pour cette série, et son désir de la faire connaître.

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  7. Bon ça y est, je l'ai lu, et j'avoue être extrêmement déçu...
    Toutes les réserves que j'avais lors des épisodes précédents prennent ici le devant de la narration, et c'est bien dommage.
    Oui, c'est bien écrit - quoique, certains dialogues - mais ce faux suspense, ne fonctionne pas du tout pour moi, nous avons ici un re-écriture des jours précédents la seconde guerre mondiale, chaque personnage "politiquement important" n'étant qu'une allégorie de son pays.
    L'histoire fonctionne beaucoup mieux quand elle se focalise sur l'institut du radium que sur Mabuse et compagnie...
    Le troisième tome laissait présager une envolée intéressante, là ça s'écrase totalement...

    Dommage.

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  8. Je m'inscris complètement à l'inverse de David. Alors que le tome 3, agréable sous d'autres aspects, essentiellements de l'ordre de la références,trainait un peu en longueur, on a enfin l'impression de rentrer dans le vif du sujet... au tome4 sur 6, il était temps.

    H-A-V-russe : Ahasvérus ?

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  9. Ce tome 4 marque un tournant pour cette BD, elle y prend une dimension humaine et historique intense.

    Et je remercie encore Rom1 pour cette découverte.

    Les auteurs ont su aborder certains des éléments les plus sombres de notre histoire avec finesse, sans en faire trop ni trop peu.

    Un grand bravo à toute l'équipe.

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